Conférences dans le cadre de la Biennale de Dakar
Le dimanche 8 mai 2016 dans le cadre du symposium de la biennale de Dakar,
« States of Opacity/Etats de l’opacité », curaté par Mara Ambrožič et Elvira Dyangani Ose.
Abstract
Etats de l’opacité temporelle
Aliocha Imhoff & Kantuta Quirós
Si la modernité a décrété, voire octroyé, aux mondes extra-occidentaux un retard fondamental – une insurmontable, incommensurable dette de temps, qu’ils seraient supposés s’évertuer à combler, faisant patienter ces géographies dans la « salle d’attente de l’histoire » (et construisant le temps historique comme mesure de la distance culturelle, « Le discours de Dakar » de Nicolas Sarkozy nous hante encore), c’est désormais, et dans le même temps, à une autre injonction temporelle que les épistémologies postcoloniales de la temporalité doivent faire face : au temps-un de de la simultanéité globale, l’illusion d’une co-temporalité, a global time. Paul Gilroy, penseur de la diaspora noire, parle de ces traducteurs de temps, que sont les chronautes de l’Atlantique noire, marqués par la catastrophique rupture temporelle qu’a constitué le Passage du Milieu. Ceux-ci se situent dans une autre tension et une autre disjonction temporelle. Nous parlons alors de temps secrets, à l’abri des yeux du monde, à l’abri des prescriptions du code. Ces temps secrets répondent à un besoin d’opacité. Opacité stratégique, opacité de résistance, « droit à l’opacité » disait Glissant. Le navire, ainsi que l’a montré Gilroy, métaphorise le mieux cette capacité à se tenir entre deux-temps. Le navire de la traite négrière, mais bientôt le vaisseau spatial des mythologies afrofuturistes deviendront « symboles connectifs, de crossover, dans le temps et dans l’espace, projetant les possibilités multiples d’un déplacement désentravé, désaliéné ». Plus encore, l’afrofuturisme a imaginé de précieux nœuds temporels, qui échappent autant aux visions modernes et progressistes du temps qu’à cette injonction à une co-temporalité et qui relèvent d’une double ontologie potentielle, entre ce qui a lieu et ce qui aurait pu avoir lieu. Le collectif Black Quantum Futurism, basé à Philadelphia, par exemple, travaille ainsi sur cette conflation entre les temps quantiques de la physique et des temporalités africaines. Sous la forme d’une série chronopolitique, notre projet de film « Les Impatients », constitue, quant à lui, une tentative de collecte de temporalités non-alignées et d’indices d’un retour de l’avenir, au cœur du moment historique que nous traversons, de la plus grande obstruction politique.
Participants au symposium
Nana Oforiatta Ayim, Kodwo Eshun, N’Goné Fall, Cheryl Finley, Henriette Gunkel, Srećko Horvat, Aliocha Imhoff, Doreen Mende, Miran Mohar, Marita Muukkonen, Kantuta Quiros, Leigh Raiford, Heike Raphael-Hernandez, Bisi Silva, Ivor Stodolsky, Studio Kakatar & Atelier Graphoui, David Zerbib
Egalement,
Le samedi 7 mai 2016 – 9h/18h à l’IFAN/Université Cheikh Anta Diop
Conférence d’Aliocha Imhoff & Kantuta Quiros dans le cadre d’une journée d’études « Enseignement de l’art. Prospective et invention pédagogique. Comment ? Pour qui ? Quelles finalités ? », à l’invitation de Malick Ndiaye (historien de l’art, Université Cheikh Anta Diop, Dakar) et d’Emmanuelle Chérel (historienne de l’art, Ecole d’Art de Nantes).
Enfin,
le peuple qui manque sera également présent dans le cadre de la 1ère African/Art/Book/Fair de Dakar dirigée par Pascale Obolo.