Festival des Cinémas différents
Mardi 12 décembre – 22h30
« Politiques de la marche »
Marches manifestantes, défilés, dérives et déambulations…
Du défilé martial des puissants infâmes mis en scène par la réalisatrice allemande Ulrike Ottinger aux manifestations de l’Existrans et la Marche contre le sida, filmée par le cinéaste expérimental Sothean Nhieim la politique se fait aussi dans la rue, on le sait. Qui est visible, qui peut occuper et transformer l’espace public.
Si on peut y récupérer la parole, on y expose aussi son corps. Dans sa dérive sensible, Steven Cohen, danseur performer sud-africain, est « au milieu de ». Par sa marche outrée, vulnérable et énigmatique, sa présence vient intensifier le conflit des espaces et des conditions. Mais, offrant son corps splendide, et dans son ambigüité même, son geste se fait aussi adresse et don. La position de l’arpenteur est solitaire, et toute intérieure.
En effet, avec le dispositif Vidéolab, si la marche est articulation d’une promesse de collectif, elle est d’abord de là où peut émerger la pensée, où se loger soi, dans un temps autre, suspensif, mais simultané à la lutte. Pensée qui témoigne, et inscrit à l’intérieur du film, dans le retrait dans la parole, et la coupure avec le spectaculaire, l’improbabilité même du film politique, toujours en deçà, s’il n’est pas insurrectionnel.
Un programme conçu et présenté par Kantuta Quiros et Aliocha Imhoff
Bidhan Jacobs, doctorant en cinéma à Paris 1 et cinéaste a écrit sur cette programmation du 12 décembre. Consulter ce texte.
Superbia – Der Stolz de Ulrike Ottinger (Allemagne, 1986) – 15’
« C’est en moi qu’a poussé l’arbre du vice dont mes six filles sont les fruits du péché : la gourmandise, la paresse, l’avarice, la colère, la jalousie la luxure. Mais voyez vous-même le carrosse de Superbia emmené par les six autres péchés, dans une marche triomphale et accompagné d’une large escorte… » Ulrike Ottinger, réalisatrice allemande à l’œuvre depuis les années 70, dont le travail allégorique, souvent qualifié de féministe et apparenté également au cinéma queer, est encore trop méconnu en France.
La vidéo de Chandelier a été réalisée au milieu des SDF noirs de Johannesburg pendant la destruction de leur bidonville par les employés municipaux de la ville (habillés en rouge) dans un ballet où la violence est omniprésente. « Les artistes ont toujours dépeint la vie sociale de leur époque, par mes déplacements en chandelier-tutu à travers le bidonville en état de destruction et par le fait de filmer, c’est ce que je fais aussi : une peinture digitale de la vie sociale, à moitié imaginaire, et à moitié horriblement vraie ». Le travail de Chandelier révèle à travers l’art de la performance, de la danse et du film, les contradictions entre l’Europe et l’Afrique, les blancs et les noirs, les riches et les pauvres, l’ombre et la lumière, le privé et le public, les forts et les opprimés, la sécurité et le danger”. (texte extrait du programme des Ballet Atlantiques, pour la présentation du spectacle not so good, Steven Cohen).
Les émotions des marcheurs semblant comme palpables à l’extérieur, ce qui étreint le cœur dans la splendeur triste et glacée de cette marche nocturne, c’est que la ville ne parle plus que de ça.
Lors de l’Existrans 2005, les pirates XXBoys filmés par le Groupe Activiste Trans clament haut et fort la beauté de leurs corps trans, de leur genre et de leur colère contre les politiques publiques, tissant de leurs présences singulières, la force de leur voix collective.
En présence de : CIPIdF (sous réserve), Sothean Nhieim. Au cinéma La Clé, 21 rue La Clef, 75005 Paris, Métro Censier Daubenton
Remerciements : Festival des Cinémas Différents, (Laurence Rebouillon, Bernard Cerf, Violeta Salvatierra, Marion Blanchard), les auteurs : Sothean Nhieim, Ulrike Ottinger, Steven Cohen, CIP-IDF (groupe Boris Barnet, Valérie Marange, Fredéric Danos, Christophe d’Hallivillée, Nicolas, etc.), GAT (Maxime) et Heure Exquise ! (Véronique Thellier), Ulrike Ottinger Filmproduktion (Ulla Niehaus), Anne Sophie Lepicard, Antonella Corsani et Isabelle Saint Saens.